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Lieu : Télécom Bretagne
Date de mise en œuvre : depuis 6 ans, au semestre d’Automne.
Domaine concerné, année, public : 3ième année, ISA, public hétérogène en âge (d’une vingtaine à une quarantaine d’années) et en origine (diverses nationalités, jeunes étudiants sans expérience, personne en reprise d’études après une longue expérience professionnelle)
UV, module : UV Business Intelligence
Volume horaire : 63h
Nombre moyen d’élèves : 45 à 60
Référentiel : (URL Portail) : https://lc.cx/42k8
URL de l’espace de cours : https://lc.cx/42kB
Enseignant (s) : Laurent Brisson
L’origine de l’innovation :
Deux constats généraux amènent tout enseignant à réfléchir sur sa manière de faire cours :
- Les acquis de formation sont rapidement oubliés ;
- Un enseignement se base sur le transfert de connaissances vers l’étudiant et l’intégration de ses connaissances par l’étudiant.
Principe de base
Laurent Brisson a initialement créé son cours dans l’optique de motiver les élèves qui n’avaient pas envie de faire de la technique.
Le cours a été modelé sur le schéma de l’apprentissage par APP (Apprentissage par Problèmes et par Projet).
En théorie, dans l’APP il y a une progressivité des problèmes soumis aux étudiants : chaque nouveau problème résolu apporte une aide importante pour résoudre le problème suivant. L’ensemble des problèmes est orienté vers la résolution d’une tâche principale : le projet.
Laurent Brisson a préféré prendre un peu de liberté avec le cadre théorique de l’APP en faisant les aménagements suivants :
- Pas de montée en complexité d’un problème à l’autre mais plutôt une « facette » qui change relativement au projet ;
- Les élèves travaillent par groupes de 6 environ avec des travaux à effectuer à la maison ;
- Les savoirs/méthodes investis par les groupes peuvent s’appliquer à plusieurs problèmes (ce qui est appris doit être exportable vers divers types de situations).
Ce schéma a été ensuite adapté pour tenir compte de constatations qui se sont imposées au cours des années :
- Le panel d’étudiants de ce cours est très hétérogène. L’origine et le niveau initial des élèves est très variable, par conséquent, leurs sources de motivation et leurs attentes sont très variées. Le besoin d’un dispositif qui permette au professeur de gérer cette diversité s’est alors imposé.
- Le développement de l’autonomie de l’élève est nécessaire mais n’est pas suffisamment favorisé par l’enseignement conventionnel. Le professeur souhaitait former des élèves opérationnels car ce cours est en dernière année et il est impératif que les élèves aient acquis cette compétence lors de leur entrée en entreprise.
Ces deux constatations propres à cette unité d’enseignement (UE) sont à l’origine de l’introduction d’une activité plus signifiante pour les élèves. Une activité d’introduction au module a donc été ajoutée. C’est vers le jeu de rôle que le professeur s’est tourné. Ce type d’activité donne une vision de l’ensemble du cours aux élèves et aide à la cohésion du groupe (team building).
Contexte : des cabinets de conseil doivent proposer à des décideurs des solutions pour le traitement et l’analyse de données informatiques (Business Intelligence). Dans une première séquence les critères de choix sont stratégiques alors que dans une seconde les critères sont techniques.
Avantages :
- Permet aux élèves de se connaître et d’avoir une vision globale du déroulement (au début les groupes se forment librement mais des contraintes ajoutées petit à petit au jeu imposent un mélange des groupes ce qui va apporter une homogénéité des groupes et faire comprendre aux étudiants que la diversité est bénéfique ) ;
- Les groupes ne sont pas tous identiques (des groupes de cabinets de conseil + un groupe de décideurs) : les élèves changent de groupe donc de situation et dans chaque groupe chacun a un rôle différent (réponse pertinente à l’hétérogénéité) ;
- Le but de l’activité est d’être le cabinet de conseil choisi par les décideurs. La compétition engagée entre groupe a pour réponse la cohésion au sein de chaque groupe (réponse à la recherche de motivation). Et en ce qui concerne le groupe des décideurs, cette position leur permet de se mettre à la place des clients et de comprendre sur quoi ils se basent ;
- Suivant que les critères de choix des décideurs soient stratégiques ou techniques, les élèves ne développent pas les mêmes compétences (variété de l’enseignement) ;
- Enfin, les critères de choix par le groupe des décideurs donnent de la signification aux critères d’évaluation utilisé par le professeur pour noter les élèves (cela permet de gagner l’adhésion des élèves aux valeurs enseignées).
- Aussi, le groupe est au cœur du dispositif. L’enseignant ne va prendre en compte que les questions posées par le groupe et non celles qui vont être posées individuellement, ce qui va permettre de développer la communication au sein des groupes.
La question de l’évaluation dans cet enseignement :
Le dispositif d’évaluation est basé sur des grilles critériées et des QCMs.
Les évaluations durent 3 heures et permettent de valider régulièrement, tout au long du projet, les connaissances acquises par chacun. Plusieurs points de contrôle ont été prévus au sein d’un groupe en activité.
De plus, des QCMs non notés (30 min) auxquels les élèves répondent seuls sont ensuite repris en groupe. La correction est distribuée aux élèves et on leur demande surtout de réfléchir aux raisons de leurs erreurs. Les questions sont toujours un peu ambiguës pour susciter le débat au sein des groupes. Les élèves travaillent ainsi leur argumentation scientifique pour convaincre leurs camarades et leur esprit critique pour juger des propositions de leurs pairs. Le fait qu’il y ait plusieurs QCMs favorise le développement de la communication et de la compétition qui a pour effet d’accroître la motivation des étudiants.
De plus, cette méthode va permettre aussi à l’enseignant d’avoir un retour sur les impressions des élèves vis à vis de son cours.
Valeur ajoutée apportée par cette innovation dans cet enseignement
Gain pour les élèves : Le dispositif d’évaluation permet de consolider les connaissances des étudiants car ils sont, lors de cette activité, dans un état d’exitation et d’implication propice à la mémorisation. Les élèves sont enthousiastes : les notions sont assimilées car mises en pratique ; l’évaluation en continu génère moins de stress que lors de partiels ; il y a moins de cours magistraux ; le dispositif favorise l’apprentissage de l’autonomie et du travail collaboratif ; le travail semble moins contraignant puisqu’il est présenté sous forme d’activités qui ont « du sens » et qui permettent de se mettre en situation quasi professionnelle pour prendre confiance ; enfin les étudiants ont accès à la grille critériée de l’évaluation de leurs compétences ce qui leur permet de voir leur évolution ;
Gain pour les enseignants : L’hétérogénéité est gérée et même mise à profit ; pas de partiel à préparer et à corriger ; passation du savoir et du savoir-faire ; vision en continu des avancées des élèves avec possibilité d’ajustement grâce au feedback instantané ;
L’activité de jeu de rôle nécessite-elle des moyens spécifiques ?
- matériel :
- Une grande salle pouvant accueillir une dizaine de tables de 6 personnes sans être serrées ;
- Une petite salle « confortable » dans laquelle aura lieu des simulations d’entretien (décideurs/cabinets de conseil) ;
- Une bibliothèque pour le travail en dehors des cours ;
- Une salle avec tableau blanc très grand format pour le brainstorming ;
- Un accès wifi permanent ;
- humain :
l’enseignant seul ne peut gérer correctement plus de 30 élèves environs. Au delà de ce nombre, il lui faut au moins une aide pour la gestion du temps des séances qui sont très minutées ;
- organisationnel :
Un planning très minutieux et une gestion des mouvements des groupes (rotation des activités) doit être élaboré en amont et la gestion du temps doit être très rigoureuse.
Des réutilisations dans d’autres cours sont-elles possibles ?
Bien sûr, ce dispositif peut s’adapter à d’autres disciplines. Certes, la préparation est longue mais on n’est pas obligé de construire en une fois une telle organisation. Laurent Brisson suggère aux enseignants de commencer par intégrer à leur cours des outils de travail en groupe puis de monter en puissance. Et lorsqu’ils se sentent prêts et motivés il peuvent réorganiser leurs cours complètement.
Dans tous les cas on peut toujours adapter le dispositif en fonction de sa sensibilité.
Le professeur a-t-il communiqué autour de cette innovation ? Par quel moyen ?
- En interne, au sein de Télécom Bretagne ;
- Par un article présenté à QPES ;
- La venue de Rolland Viau à Télécom Bretagne le 19 avril 2016 a été l’occasion pour Laurent Brisson de présenter un poster présentant cette innovation pédagogique ;
Quels sont les contraintes et les points d’amélioration possibles ?
- Du point de vue des enseignants
La préparation du cours prend beaucoup de temps. Le jeu de rôle doit être calibré, minuté, il n’y a pas de place pour l’improvisation ou le hasard. Un planning serré doit être organisé et respecté. En ce qui concerne l’élaboration des scénarios, il est difficile de doser la difficulté car les étudiants se débrouillent seuls. En effet un problème trop difficile peut bloquer durablement les étudiants dans leur apprentissage, tandis qu’un problème trop facile illustrerait une théorie simpliste.
De plus Laurent Brisson a détecté le besoin naissant de palier aux manques de connaissance ou d’autonomie (car la transition vers l’autonomie ne se fait pas à la même vitesse pour chacun). Il projette de créer des vidéos ciblant les manques.
En ce qui concerne l’évaluation, la production commune est par nature difficile à différencier (comme les travaux se font en groupe, il est plus difficile d’évaluer les compétences au niveau individuel). Mais la proposition de mécanisme d’évaluation est une première solution.
Enfin, vu la complexité du dispositif, le professeur est difficilement remplaçable.
- Du point de vue des étudiants
Les étudiants travaillent jusqu’à 80h de plus que le volume horaire en classe (63h). Laurent Brisson note un effet « d’emballement » sans doute dû à la compétition entre groupes et à la projection dans leur future activité professionnelle.
Enfin, les étudiants doivent rester impliqués tout au long du projet car ils sont évalués en continu.
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Lien vers l’origine de l’article
Par : Gilles Jacovetti